LA CASA POPULAR

 

Mortilla de Alarcon (fin fond de la campagne espagnole centrale):

Nous partons vers 8 h30 du soir pour voir les bandas (nous avions vu des affiches au camping pour un festival de bandas). A notre grande surprise, le centre ville de Mortilla de Alarcon est fermé par des barrières et la rue principale est pleine de monde. Les ramblas, Avenida del Ratio, sont des allées centrales bordées de marroniers et de bancs. Les gens s'y promènent d'un pas nonchalant. Les femmes sont bien habillées, bien coiffées. Elles portent de grandes jupes plissées et colorées, des gilets brodés. Hommes et femmes marchent la tête haute, l'air fier. C'est presque une parade, le défilé d'une mini société villageoise. Les vieux sont assis sur les bancs : ils regardent passer les gens eux aussi. Les enfants courent au milieu. De jeunes mamans passent, poussant des bébés joliment habillés comme des poupées espagnoles.

Sur une place à côté, un groupe d'hommes installe un manège. La fête se prépare. Ils ont le teint basané, les muscles forts. Ils travaillent tous ensemble. De temps en temps ,une femme sort d'une caravane et vient crier des mots que je ne comprends pas. A l'intonation ce sont des mots secs qui n'attendent pas la réponse, des ordres, des remarques.

Une petite fille tourne autour de Lucien. Elle le regarde puis, vite fait bien fait, lui tire la langue. Il la regarde, ne répond pas. Elle revient, me tire la langue, je lui souris. Il y a beaucoup de Vanessa Paradis qui se promènent, quelques unes ont du mal à assumer leurs hauts talons, mais dans l'ensemble elles sont gracieuses marchant par groupe de trois ou quatre. Des adolescents, nous n'en voyons pas.

Nous allons vers les bandas sur le stade municipal, mais déception, il n'y a plus de sono ni d'affiche. Nous nous interrogeons sur les dates mais nous avons beau recalculer, elles correspondent.

Nous retournons sur les ramblas, bras dessus-bras dessous, l'air aussi droit et noble que possible, et choisissons un café. Tables et chaises jaune "Schweppes". Nous commandons deux cervezas et deux cocas. Jérôme demande s'il y a des bandas. "Si, si," nous répond le serveur en nous posant nos boissons et une assiette de chips: "à la CASA POPULAR". Sur les ramblas, une petite cahute où une dame vend des bonbons. Elle décortique et machouille d'une main experte les fameuses graines de tournesol. Les enfants affluent, choisissent longuement et repartent.

Les autres clients du café mangent des petits plats, on dit tapas, avec des coquillages: couteaux, praires...Les jeunes garçons passent à vélo dans les rues libérées des voitures. Nous payons 540 pesetas nos consommations et partons vers la CASA POPULAR.

Des gens s'attardent devant la porte. L'entrée est gratuite, nous rentrons. Nous sommes surpris par le modernisme de l'architecture qui est très belle et très aérée. Nous montons un grand escalier blanc et arrivons dans une belle salle de spectacle. Tout est plein. Sur la scène, bordée de gros rideaux pourpres de velours, un orchestre, sans doute une école de musique, joue des airs classiques. Une soixantaine de musiciens de quinze à soixante ans s'y produisent. Des clarinettes, des hautbois, des bassons, des flûtes traversières, des saxophones, des cors et des percussions. Pas de violons ni aucun autre instrument à cordes. Nous nous croyons dans un film. Le chef d'orchestre s'agite, certains musiciens jouent faux, l'ambiance est surréaliste. Dans la salle, toutes les femmes agitent presque en rythme leurs éventails car il fait vraiment très chaud. Quand ils ont fini de jouer, un tonnerre d'applaudissements puis aussi vite, les gens se lèvent et s'en vont. Le chef d'orchestre tente de les rappeler, mais personne n'entend. Une voix plus forte arrête le mouvement du départ. Trois personnes entrent sur scène. Nous comprenons qu'il va y avoir une remise de prix, de trophées. Nous sortons.

Dans d'autres salles de la CASA POPULAR, nous découvrons les peintures d'artistes locaux. Un peintre, Mar, retient notre attention. Nous ressortons et reprenons une dernière fois les ramblas. Nous rentrons nous coucher au camping. Demain nous partons pour Madrid.